France – 29/06/2021 – energiesdelamer.eu. 1ère interview de Béatrice Aliphat, maire de Saint-Mitre-les-Remparts, ancienne conseillère régionale de la Région Sud, qui présidait la commission mer de l’Assemblée maritime avec le Pôle mer Méditerranée et la DIRM. Du 12 juillet au 31 octobre prochain se déroule le débat public organisé par la CPDP Méditerranée, avec, en avant-première, deux webinaires les 5 et 7 juillet prochains à 18h.
En prévision de ce débat, vous avez travaillé avec des associations et des élus sur les enjeux environnementaux et économiques d’un parc éolien en mer flottant, quelles sont les attentes ?
Béatrice Aliphat – Tous les acteurs sont unanimes sur la nécessité d’adaptation au changement climatique avec des objectifs fixés pour 2030 par l’UE :
. Réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % (par rapport aux niveaux de 1990)
. Porter la part des énergies renouvelables à au moins 32 %
. Améliorer l’efficacité énergétique d’au moins 32,5 %
En revanche la méthode pour y parvenir peut diverger. Je pense qu’il ne faut pas opposer de manière simpliste la lutte pour la protection de l’environnement et une politique ambitieuse de transition énergétique, et dans notre cas précis la préservation de la biodiversité du milieu sensible de la mer à la production d’énergies renouvelables avec des éoliennes flottantes.
Il s’agit au contraire de 2 enjeux majeurs de notre société qu’il faut travailler avec les acteurs de ce débat ensemble, en toute transparence.
Il n’existe pas la bonne ou la mauvaise solution mais des compromis équilibrés pour que chacun y trouve une part de son compte. En effet, d’autres sujets importants impactent ces projets : je veux parler de l’emploi et la formation sur le territoire concerné, de l’implication du tissu économique local ou du moins du tissu national, du financement des projets, des modifications des usages en mer à prendre en compte, mais aussi de la question démocratique et la part de l’intervention citoyenne avec le processus de décision du gouvernement pour choisir les futurs emplacements.
De quelle manière l’Assemblée Maritime pour la Croissance Régionale et l’Environnement – AMCRE a-t-elle était active et comment avez-vous travaillé avec votre homologue Didier Codorniou, Président du Parlement de la mer et Vice président du Conseil régional d’Occitanie ?
BA – L’Assemblée maritime est constituée de différentes commissions, dont la Commission Energies Marines. Je présidais cette instance avec le Pole mer Méditerranée et la DIRM. Nous nous sommes focalisés pour ce mandat région 2015-2021 sur les éoliennes en mer.
En 1er lieu, le soutien au projet pilote Provence Grand Large (PGL) au large de Port Saint Louis du Rhône avec ses aménagements portuaires spécifiques, la participation active aux concertations locales en particulier avec les associations environnementalistes, les fédérations de pêcheurs…, la création d’une « task force » réunissant tous les partenaires impliqués dans le projet (Région, Métropole, CCI, FEE, GPMM, industriels…) pour accélérer et fluidifier les démarches.
Dans un second lieu, la participation aux différentes étapes de préparation des futurs appels d’offres. C’est à cette période, que j’ai initié une collaboration étroite avec l’Occitanie dans l’objectif d’un débat public commun, mais aussi un véritable coup de force pour que le gouvernement accepte de lancer 2 appels d’offre de 250 MW chacun sur chacune des 2 régions. S’en est suivi un travail commun en ateliers avec les 2 régions (Parlement de la mer et AMCRE) pour définir ensemble les 4 zones « propices » à l’implantation des 2 futures fermes commerciales.
Comment expliquez-vous que l’éolien et l’éolien en mer soient devenus un enjeu pour les régionales comme argument politique ?
En période électorale, les prises de position des partis politiques sont en général exacerbées ; celles de certains partis politiques sur l’éolien terrestre et l’éolien posé sont influencées par les contestations des citoyens et leurs collectifs, appuyées par certains élus, par les colères de professionnels impactées … En effet ces différents protagonistes ont vécu ou vivent encore une ou plusieurs gènes par rapport à ces éoliennes qu’ils expriment de manière plus ou moins virulente. D’autres prises de position politique consistent à repositionner l’enjeu de changement climatique comme prioritaire au cœur des débats avec la production d’énergies renouvelables, dont celles produites par les éoliennes.
Nous voilà donc face à 2 prises de positions tranchées et jusqu’au-boutistes que la politique attise en période sensible. Pour moi, la réalité se trouve dans un juste équilibre. Et en particulier, l’impact sur le bien-vivre des citoyens des éoliennes flottantes loin des côtes, est beaucoup moins fort que celui des éoliennes terrestres et posées en mer. Concernant l’impact environnemental de l’éolien flottant, il reste bien évidemment des études à approfondir pour enrichir la connaissance faible sur le sujet avant de pouvoir émettre un avis qui pourrait être trop radical.
Vous avez été au long de votre mandature une élue pionnière pour le développement des énergies renouvelables en Région Sud. Renaud Muselier, réélu président de la Région Sud, est cosignataire avec les présidents des régions Occitanie, Bretagne, Nouvelle-Aquitaine, Pays de la Loire et Normandie de l’appel pour l’éolien flottant, lancé à Montpellier en mai 2019. La région de 1000 km de côtes ambitionne d’être le premier territoire français à réaliser les objectifs des Accords internationaux sur le Climat de Paris en mobilisant la totalité de ses capacités de production en énergies renouvelables. Pourtant, le site du Conseil régional qui souhaite atteindre une neutralité carbone d’ici 2050, ne mentionne pas les énergies renouvelables de la mer, alors que nous sommes à quelques jours du début du débat public Méditerranée dont l’objectif est de déterminer les attentes des différentes populations et usagers de la mer.
BA – La Région Sud lors de mon mandat s’est toujours et plus que jamais mobilisée pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, et j’ai porté cette ambition avec beaucoup de pugnacité, c’est vrai. Cet objectif ne peut être atteint que si le développement de la production de l’ensemble des énergies renouvelables « passe la vitesse supérieure ! ».
Aussi, le nouveau Plan Climat (sa 2ème révision) « Gardons une COP d’avance », voté le 23 avril 2021 est une des concrétisations pragmatiques de cette politique environnementale, au-delà des grands schémas régionaux de planification (comme le SRADDET, Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Egalité des Territoires) qui ont défini les grandes ambitions de développement territorial. Ce nouveau Plan Climat notamment dans l’Axe 4 ENERGIE avec sa mesure 84 : « inaugurer le premier parc éolien flottant en mer et poursuivre le développement des fermes commerciales au large du Golfe de Fos pour atteindre 2 GW en 2050 ».
Concernant le débat public qui débutera dans quelques jours, début juillet, je ne peux imaginer qu’une seule position : que la Région Sud soit encore présente et très impliquée, comme elle l’a été ces 5 dernières années, dans toutes les manifestations, réunions, débats, pour prendre part à cette concertation essentielle. A titre personnel, je participerai à ce débat pour honorer cette position, mais aussi pour remercier d’une certaine façon le service mer de la Région, avec 2 personnes en particulier, Valérie Raimondino et Dominique Jardiné pour leur implication sans faille à mes côtés !
A l’occasion de la réunion du Conseil maritime de façade méditerranée, le Préfet maritime et le préfet vous ont chaleureusement remerciée pour votre engagement. Quels souhaits avez-vous ou souhaitez-vous exprimer ?
BA – Ce conseil maritime en travaillant à l’échelle de la façade méditerranéenne met de côté les limites administratives des 3 Régions, Corse, Occitanie et Sud, pour les sujets stratégiques déclinées de l’Europe et du National vers les littoraux, comme le Document Stratégique de Façade (DSF), Pour que les 80 acteurs du Conseil se mobilisent efficacement sur ces politiques, il est essentiel que les positions soient travaillées en amont en commission permanente et que chaque représentant de la commission puisse échanger avec les autres membres de leurs collèges respectifs. Ce CMF de jeudi dernier a été très riche en interventions et mon pari de ne plus en faire qu’une chambre d’enregistrement pour les services de d’Etat a été gagné !
Ensuite, j’espère vraiment que la commission Emploi Formation nouvellement créée sera productive et je n’en doute pas une seconde ! De même, le groupe de travail sur les zones de protection forte a fort à faire pour traduire les règlements et les adapter efficacement et consensuellement sur nos littoraux. Enfin, la commission spécialisée sur l’éolien flottant et son conseil scientifique en appui, entre dans une phase stratégique avec le débat public sur les fermes commerciales et les orientations qui en découleront. Il est d’autant plus essentiel de poursuivre les échanges au sein du conseil pour une concertation réussie et structurée.
J’ai eu l’occasion de remercier tous les personnes actives de ce CMF mais je réitère mon profond respect pour le professionnalisme du service de la DIRM et des services des préfectures, de région et maritime.
Enfin, le CMF Méditerranée doit absolument continuer à être fortement représenté au sein du CNML. En effet la Ministre de la Mer souhaitant réformer ce dernier en profondeur, la participation à cette instance permet d’être au cœur de l’articulation et des décisions entre les CMF représentant les territoires et le CNML.
Photo : Conseil régional Région SUD – PACA
En amont du débat public sur l’éolien flottant en Méditerranée, la commission de débat public de Méditerranée présidée par Etienne Ballan organisent deux visio-conférences : la première le 5 juillet consacrée à l’environnement et la seconde le 7 juillet sur la politique énergétique. Les deux webinaires sont programmés de 18h à 19h30 pour connaître le programme et les invités et s’inscrire cliquez sur les liens respectifs des 5 et 7 juillet.
POINTS DE REPÈRE
MerVeille Energie #3 – Spécial Flottant – Table ronde au Salon du Littoral sur le futur débat public de Méditerranée page 22
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