France – Vendredi 23/11/2018 – energiesdelamer.eu. Les Français veulent réduire la part du nucléaire à 50 % du mix électrique, c’est le résultat du sondage réalisé par l’IFOP entre les 8 et 13 novembre à la demande du collectif «Les Acteurs en Transition Energétique*» et la Fondation européenne pour le climat.
Le Collectif et la Fondation publient ce sondage réalisé par l’IFOP sur l’opinion des Français concernant la politique énergétique du pays à 4 jours de la présentation de la PPE par le Président de la République. Le CLER (Réseau pour la transition énergétique) et Réseau Action Climat, la CFDT et FEE (France Energie Eolienne) demandent à nouveau, à la suite de cette enquête, plus d’énergies renouvelables dans la PPE et soulignent (en extrapolant) que la majorité des Français souhaite (soit 53% au total) maintenir l’échéance de 2025 (43 %) ou la repousser à 2030 (10%).
La PPE sera l’heure de vérité du gouvernement face aux citoyens notament pour le développement ou le maintien du nucléaire. Les Français jugent sévèrement la politique énergétique du pays et souhaitent plus d’ambition pour la transition.
Transition énergétique : la France est en retard
Près de 6 Français sur 10 estiment que la France est « plutôt en retard » en matière de transition énergétique (58%), contre moins d’un sur trois qui pense qu’elle est « dans les temps », et 3% « en avance ».
Partagé par la majorité de nos concitoyens dans toutes les catégories, quel que soit le sexe, l’âge, la catégorie socio-professionnelle et l’appartenance politique (à l’exception des sympathisants du MoDEM :41%), ce jugement apparaît plus nettement au sein des catégories sociales aisées (CSP+ : 64 %) et encore davantage parmi les sympathisants de La France Insoumise (LFI, 81%) et d’Europe-Ecologie Les Verts (EELV, 78 %).
Les Français veulent réduire la part du nucléaire à 50 % du mix électrique
Le sondage reprend les principales questions du questionnaire de la commission nationale du débat public (CNDP) concernant la PPE, dont les résultats avaient fait apparaître la volonté des Français de réduire la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité, de préférence dès 2025 comme prévu par la loi de transition énergétique.
De fait, malgré l’annonce du report sine die de l’objectif d’une baisse à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité et les signaux envoyés par le gouvernement en faveur d’un report à 2035 voire au-delà,ce nouveau sondage montre que la majorité des Français souhaite maintenir l’échéance de 2025 (43 %) ou la repousser à 2030 (10%), soit 53% au total.
A l’inverse, 8% des Français se disent favorables à un report à 2035, tandis que seuls 21 % rejettent l’objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité.
Il est intéressant de noter qu’un fort clivage générationnel apparait sur la question du nucléaire : 82 % des personnes de moins de 35 ans soutiennent la réduction à 50%, tandis que parmi les personnes de plus de 65 ans, seule une courte majorité (55%) soutient cet objectif.
Interrogés sur les décisions à prendre cette année, les Français semblent attendre davantage d’ambition de la part des décideurs politiques, puisqu’ils sont 55 % à estimer qu’il faut décider de fermer d’autres réacteurs nucléaires, en plus de ceux de Fessenheim.
Cet avis est encore plus majoritaire parmi les moins de 35 ans (64 %), les CSP+ (63 %) et les sympathisants de LFI (76 %), d’EELV (79%) et aussi du Parti socialiste (71%), tandis qu’il reste minoritaire parmi les sympathisants des partis classés à droite (32%).
Interrogés sur la perspective de prolonger l’exploitation des réacteurs nucléaires actuels, les interviewés se montrent majoritairement opposés à un prolongement au-delà de 40 ans (55 %), et plus de deux sur trois rejettent l’idée d’un prolongement au-delà de 50 ans (68%).
Pour Anne Bringault, coordinatrice des ONG sur la transition énergétique pour le CLER – Réseau pour la transition énergétique et le Réseau Action Climat : « Emmanuel Macron devra entendre les Français qui expriment clairement le souhait que les objectifs concernant la baisse de la part du nucléaire soient tenus au plus vite ».
ENR, efficacité, mobilités : la France n’agit pas suffisamment.
Alors que la France s’est engagée dans la loi sur la transition énergétique à atteindre 32 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique en 2030, plus des deux tiers des Français jugent que par rapport à ses voisins européens, la France n’agit pas suffisamment en matière d’énergies renouvelables (71 %). Cette proportion atteint même 81 % parmi les sympathisants de LFI, 82 % parmi ceux de La République en Marche (LReM), et 90 % parmi ceux d’EELV.
De même, 69 % des Français estiment que la France n’en fait pas assez en matière d’économies d’énergies.
Pour Olivier Perot, président de France Energie Eolienne : « Les Français ont bien compris que le nouveau monde était celui du développement des énergies renouvelables. Massivement soutenues par l’opinion, compétitives et efficaces, les renouvelables sont capitales pour la diversification et la sécurité d’approvisionnement du système électrique français. Comme l’indique RTE, le développement des énergies renouvelables et en particulier de l’éolien offshore est indispensable pour tenir l’engagement de fermeture des centrales charbon et les objectifs de réduction du parc nucléaire français. Les Français veulent une électricité plus propre, renouvelable, sûre et sans déchets dangereux, le gouvernement doit donner un cap clair ».
Concernant les mobilités alternatives et durables, 66 % des Français jugent que la France n’agit pas suffisamment – un chiffre particulièrement frappant à l’heure de la mobilisation des gilets jaunes, qui met en lumière les effets néfastes de notre dépendance au pétrole. A noter aussi que sur ce point, les Français vivant en zone rurale ou en ville en province sont aussi nombreux que les habitants de la région parisienne à juger que la France n’en fait pas suffisamment.
Une politique énergétique incohérente et pas à la hauteur des enjeux
In fine, seuls 29% des Français estiment que la politique énergétique actuelle de l’Etat est cohérente, contre 62% qui pensent le contraire. Ils sont même 71 % à juger qu’elle n’est pas à la hauteur des enjeux, avec des pics à 82% parmi les sympathisants de LFI et à 84% parmi ceux d’EELV. Même parmi les sympathisants LReM, seuls 32% jugent la politique actuelle à la hauteur des enjeux.
Pour Philippe Portier, secrétaire national de la CFDT : « Ce sondage nous conforte dans nos analyses et positionnements : Il y a une attente forte de la population pour que le nucléaire prenne à l’avenir une part moins importante dans notre mix énergétique. Pour ce faire, nous pensons que les investissements publics et privés doivent davantage soutenir les projets visant à développer les énergies renouvelables de demain. Ensuite, une très large part de la population attend beaucoup plus en matière de mobilités durables. Nous devons trouver collectivement des alternatives rapides et opérationnelles aux énergies fossiles et cela, sur l’ensemble des territoires ».
Déclaration à laquelle on peut ajouter l’interview de Philippe Martinez Secrétaire général de la CGT à energiesdelamer.eu le 14/11/2018, où il affirme que « les EMR doivent avoir une part importante dans la PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Energie), ce qui qui permettrait enfin, la mise en route de cette filière qui se développe déjà très fortement dans de nombreux autres pays européens et dans le monde.
La PPE et la Loi d’orientation sur les mobilités (LOM), prochains rendez-vous de la politique énergétique française
Pour répondre aux préoccupations exprimées par les Français, les annonces d’Emmanuel Macron attendues (pour le 27 novembre) doivent selon le collectif « les Acteurs en Transition énergétique » s’appuyer sur des principes forts :
- Améliorer le confort et alléger le budget des ménages par la massification de la rénovation des logements; les mesures et aides financières doivent être renforcées, simplifiées et mieux fléchées, en particulier en faveur des plus précaires.
- Réduire la pollution de l’air et les émissions de gaz à effet de serre (GES) en donnant la priorité aux modes de transports plus propres (covoiturage, transports en commun, vélo…) et en accélérant le déploiement des véhicules électriques et bio-GNV ;
- Faire le choix clair des énergies renouvelables, de plus en plus compétitives et créatrices d’emplois, en se donnant les moyens de dépasser les 32 % d’énergies renouvelables en 2030 ;
- Sortir des énergies fossiles en rendant accessibles à tous et à toutes des alternatives et en accompagnant les transitions professionnelles dans les bassins d’emplois concernés ;
- Planifier précisément la baisse de la production électrique nucléaire, conformément aux objectifs de la loi de transition énergétique, tout en permettant le développement d’un système davantage décentralisé reposant sur des ressources locales durables, en anticipant les mutations pour les acteurs et territoires concernés.
Points de repère
*collectif rassemblant syndicats, acteurs économiques, ONG et associations de collectivités
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)
Née dans le cadre de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), la PPE constitue un outil de pilotage pour la politique énergétique de la France. Elle doit être révisée en 2018 pour deux périodes, 2018-2023 et 2024-2028.
Le 7 décembre 2017, Libération avec la Frankfurter Allgemeine Zeitung avait publié un sondage commandé à l’institut Harris Interactive par la Fondation Heinrich Böll (proche des Verts allemands) et la Fabrique Ecologique écologiste allemande, où « 83 % des personnes interrogées pensaient que la France ferait mieux d’investir dans les énergies vertes que dans le nucléaire …
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